Hommage au Professeur Jean-Marie MANTZ

01/10/2023
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Texte

Le Professeur Jean-Marie MANTZ nous a quitté le 14 octobre 2023. Il faisait partie de la première génération des réanimateurs, fondateurs de la discipline de réanimation.

Jean Marie MANTZ est né le 8 mars 1926 à Henridorf (Moselle), deuxième enfant d’une fratrie de trois garçons. Ses parents étaient instituteurs.

Sa scolarité est affectée par le calendrier de la deuxième guerre mondiale.

Elle débute en Lorraine : il entre en classe de 6e au Lycée Faber à Metz en 1936, puis, en raison de l’évacuation de la Lorraine, elle se poursuit à Angers en 1939, Poitiers en 1940, puis Châtellerault où il obtient son baccalauréat en 1943, section Philosophie/Sciences avec la mention très bien.

Il débute ses études de médecine à Poitiers en 1944 (cours préparatoire) puis à Strasbourg à partir de 1945, la guerre ayant pris fin.

Son cursus

Il est reçu major à l’internat des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg en 1948.

Son premier stage est effectué dans le service de dermatologie. Le deuxième poste d’interne est occupé par Janine LE CORROLLER. Elle deviendra son épouse en 1950 et la mère de leurs cinq enfants.

C’est dans le service de Médecine Interne du Professeur Julien WARTER que Jean-Marie MANTZ gravit tous les échelons de la carrière Hospitalo-Universitaire pour devenir Professeur Agrégé de Médecine Interne et de Thérapeutique en 1958.

Il est nommé en 1960 chef du service de Réanimation, nouvellement créé, à la suite de l’épidémie de poliomyélite qui sévit alors en Europe et en Amérique du Nord.

Dans ce service, de nombreux patients en situation critique sont pris en charge avec un taux de succès jusque-là inespéré.

Les progrès rapides de cette spécialité nécessitent bientôt l’ouverture de lits supplémentaires qui passent de 9 à 25 puis à 55 en 1979 avec l’ouverture d’un deuxième service à l’Hôpital de Hautepierre sous la direction du Pr Jean-Daniel TEMPE, son élève.

Parallèlement à cette extension, Jean-Marie MANTZ développe l’activité de Toxicologie, avec l’ouverture en 1968 du Centre Antipoison, confié à la responsabilité du Pr Albert JAEGER.

En 1982, dans le but de de solutionner les difficultés de retour à domicile de patients hautement dépendants hospitalisés dans le service, il crée l’Association ADIRAL qui permet l’appareillage à domicile de ceux-ci. Elle est placée sous la responsabilité du Pr Philippe SAUDER. Quarante ans plus tard cette structure s’est développée et prend en charge plus de 10 000 patients à domicile.

En 1988 il crée, dans le même bâtiment, et à proximité du service de Réanimation, le service d’accueil des Urgences Médicales, qui sera confié au Pr Jacques KOPFERSCHMITT.

Cette diversification d’activités se fait grâce à des renforts humains. L’école strasbourgeoise de réanimation, initiée par Jean-Marie MANTZ, sera à l’origine de la nomination de 10 PUPH à sa suite : Jean-Daniel TEMPE (1974), Albert JAEGER (1975), Michel HASSELMANN (1989), Philippe SAUDER (1991), Jacques KOPFERSCHMITT (Thérapeutique 1992), Francis SCHNEIDER (1996), Vincent CASTELAIN (2008), Ferhat MEZIANI (2011), Pascal BILBAULT (Médecine d’Urgence 2015), Julie HELMS (2019).

A l’étranger cinq anciens élèves ayant bénéficié d’une formation strasbourgeoise dans le service de Réanimation ont été nommés Professeurs : Abdellatif BENMATI et Hafid BOUHROUM (Constantine, Algérie), Yiming LU (Shanghai, RP Chine), Lijun LIU (Suzhou, RP Chine), Khalid ABIDI (Rabat, Maroc).

Ce travailleur infatigable est l’auteur de plus de 400 publications en recherche fondamentale, recherche clinique et histoire de la médecine.

Il a défendu haut et fort la réanimation et a été élu président de la SRLF en 1973.

Au plan universitaire, Jean-Marie MANTZ a effectué deux mandats de Doyen à la Faculté de Médecine de Strasbourg (de 1983 à 1989).

Il est l’initiateur du stage obligatoire de réanimation, de la Capacité de Médecine d’Urgence et de Réanimation (CMUR), de la réorganisation du Certificat de Synthèse Clinique et Thérapeutique (CSCT).

Il est l’un des deux coordonnateurs français pour l’organisation des stages Erasmus des étudiants en médecine européens.

Il a créé, en partenariat avec Le Pr Pierson à Nancy un Diplôme Interuniversitaire d’Ethique Médicale.

Il a présidé de 2000 à 2010 le Comité d’Éthique des Facultés de Médecine, de Pharmacie et d’Odontologie et des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg.

Il a initié et/ou développé les relations de coopération internationale dans le domaine de la médecine, en particulier avec Madagascar (Majunga), l’Algérie (Constantine) et la Chine (Shanghai, Suzhou). A travers celles-ci, de nombreux médecins étrangers ont été formés à la réanimation et à la médecine d’urgence, notamment en Algérie et en Chine, où il reste très populaire.

Il a été honoré de nombreuses distinctions et postes de responsabilité : Chevalier dans l’ordre de la Légion d’Honneur, Commandeur dans l’ordre des Palmes Académiques, membre Émérite de l’Académie Nationale de Médecine, membre de l’Académie nationale de Metz, membre de l’Académie d’Alsace, membre du Mérite Européen, membre de l’Association des Écrivains médecins, membre du cercle Gutenberg.

 

Cet homme extraordinaire, passionné et passionnant, nous a quittés au terme d’une vie et d’une carrière exceptionnelles.

Il était d’une ouverture d’esprit hors norme, tout le passionnait, rien ne le laissait indifférent : la médecine, la réanimation, l’histoire de la médecine et l’éthique. Il s’intéressait aux nouvelles technologies, à l’intelligence artificielle. C’était également un artiste, poète, écrivain, collectionneur et expert en minéraux, un grand sportif et joueur expérimenté aux échecs. Cet humaniste avait une volonté de fer, il était déterminé, ambitieux, curieux de tout, infatigable, plein d’humour. C’était un orateur hors pair. Il était généreux et bienveillant, très accueillant avec sa femme Janine et père aimant de ses cinq enfants.

Malgré de graves ennuis de santé sur la fin de sa vie il a gardé sa vivacité d’esprit jusqu’au dernier instant.

Nous tous, qui avons eu le privilège de l’accompagner de près ou de loin, avons perdu un être d’exception. Nous lui rendons un dernier hommage, empli d’admiration et de respect, et affirmons notre soutien à sa famille et ses proches.