Rapport 2023 sur l’état des lieux du sexisme en France : un constat préoccupant, un défi pour l’avenir

08/02/2023
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Edito FEMMIR
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Le 23 janvier 2023 est paru la 5e édition du rapport annuel du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes (instance gouvernementale) sur l’état des lieux du sexisme en France .

Si la sensibilité à l’égard des inégalités et des violences est plus grande, les biais et les stéréotypes de genre, les clichés sexistes et les situations de sexisme quotidien continuent d’être banalisés. Les constats dressés par ce rapport interpellent :

  • Les inégalités perdurent et touchent tous les milieux: certaines filières restent  difficiles d’accès pour les femmes, et à l’inverse elles sont surreprésentées dans les métiers les plus précaires ; 37 % des femmes affirment avoir déjà vécu des discriminations sexistes dans leurs choix d’orientation professionnelle. Les milieux  politique, religieux, sportif, médiatique sont également touchés… A titre d’exemple, les femmes totalisent 43% de la représentation médiatique télévisuelle, mais seulement 36% du temps de parole.
  • 80% des femmes interrogées déclarent avoir été confrontées à des inégalités de traitement en raison du sexisme (contre 37% des hommes) :  57 % des femmes ont déjà subi des plaisanteries ou remarques sexistes (au sein des catégories socio-professionnelles supérieures, il s’agit de 2 femmes sur 3), 41 % un déséquilibre dans les tâches ménagères, 41 % des sifflements et gestes déplacés de la part d’un homme.  La grande fréquence des violences ne peut être ignorée : 14% des femmes déclarent avoir subi un ou des actes sexuels imposés (viols ou agressions sexuelles). De plus, 37% ont vécu des situations de non-consentement. 15% des femmes déclarent avoir reçu des coups de leur partenaire ou ex-partenaire. Ces données sont corroborées par les chiffres 2022 du ministère de l’intérieur (enquête conjoncture interstats https://www.interieur.gouv.fr/Interstats/Publications/Interstats-Conjoncture)
  • En conséquence, 90% des femmes adoptent des conduites d’évitement des situations où elles peuvent être confrontées au sexisme : par exemple elles ne s’habillent pas comme elles le souhaiteraient (52 %), veillent à ne pas parler trop fort ou hausser le ton (41 %), censurent leur propos par crainte de la réaction des hommes (40 %), voire ressentent des difficultés à prendre la parole au sein d’un groupe (18%).
  • Pourtant, le sexisme et les stéréotypes sexistes, faisant le lit des situations de domination et de violence, continuent à être banalisés. Par exemple, 23% des hommes de moins de 35 ans considèrent qu’il faut parfois être violent pour se faire respecter (ils sont 11% tous âges confondus) et seulement 37% des hommes estiment problématique qu’une femme cuisine tous les jours pour toute la famille.

A partir de ces constats, le Haut Conseil à l’égalité a dressé une liste de 10 recommandations, s’articulant autour de 3 volets :

  • Un volet éducatif, pour changer structurellement le regard sur les stéréotypes sexistes et agir sur les mentalités: application de la loi sur l’éducation à la sexualité et à la vie affective, évaluation des manuels scolaires, formations obligatoires au travail, interdiction de la publicité pour les jouets genrés…
  • Un volet financier avec notamment une augmentation des moyens alloués à la police et à la justice, et une conditionnalité de l’attribution des financements publics à des critères d’égalité.
  • Un volet juridique axé sur la régulation des contenus numériques et la lutte contre la diffusion de contenu pornographique illicite.

Ce rapport montre le caractère systémique des stéréotypes sexistes et l’ampleur des violences sexistes et sexuelles. Les représentations, l’éducation, doivent changer dans toute la société. A ce titre, la SRLF, via le groupe FEMMIR contribue à l’évolution des mentalités dans le domaine de la réanimation. La lutte contre le sexisme doit être menée pour nos collègues, nos étudiant·es, nos patient·es. Nos propres clichés intériorisés à tous et toutes doivent être questionnés. Chaque situation de sexisme tolérée fait le lit d’infraction plus graves, pouvant aller jusqu’aux violences sexistes et sexuelles. Tout le monde est concerné. La récente enquête menée par le FEMMIR auprès des réanimatrices françaises va dans le même sens : 31% des participantes déclaraient que le fait d’être une femme avait été un frein dans leur carrière, et ce chiffre montait à 73% concernant la grossesse. Trente-sept pourcent des déclarantes rapportaient avoir subi du harcèlement sexuel sur leur lieu de travail (Hauw-Berlemont, AIC, 2021).

De nombreux progrès ont été faits ces dernières années au sein de la SRLF : prise de conscience des inégalités, parité dans les commissions, féminisation des intervenant·es en congrès, etc. Il reste beaucoup à faire, et nous devons considérer cela comme un défi enthousiasmant. Nous pensons tou.te.s ensemble le monde de demain, plus sûr et juste pour tou.te.s.