L’électrostimulation pharyngée peut-elle aider à décanuler les patients avec un AVC ?

09/01/2020
Auteur(s)
Image
Article Lancet
Texte

Pharyngeal electrical stimulation for early decannulation in tracheotomised patients with neurogenic dysphagia after stroke (PHAST-TRAC): a prospective, single-blinded, randomised trial.
Dziewas R, Stellato R, van der Tweel I, Walther E, Werner CJ, Braun T, Citerio G, Jandl M, Friedrichs M, Nötzel K, Vosko MR, Mistry S, Hamdy S, McGowan S, Warnecke T, Zwittag P, Bath PM; PHAST-TRAC investigators.
Lancet Neurol. 2018 Oct;17(10):849-859.

Texte

Question évaluée

Vérifier si l’électrostimulation pharyngée appliquée chez des patients avec un AVC hémisphérique sévère et trachéotomisées pouvait améliorer la déglutition et donc permettre la décanulation.

Type d’étude

Etude multicentrique prospective randomisée contrôlée en simple aveugle.

Population étudiée

Patients âgés de plus de 18 ans avec un AVC ischémique ou hémorragique supratentoriel, ayant été ventilés plus de 48 h et sevrés, désédatés depuis 3 jours au moins avec un RASS à – 1, trachéotomisés et présentant une dysphagie sévère (évaluée par fibroscopie).

Méthode

La stimulation était délivrée via une électrode placée sur une sonde gastrique. Les patients étaient randomisés 24 h après la pose et stimulés (PES) ou pas (SHAM) 10 minutes par jour pendant 3 jours avec une intensité de 1 mA à 50 mA (33,6 en moyenne). Le critère principal était la possibilité de décanulation à 3 j de stimulation (retrait de la canule ou dégonflage du ballonnet). Les patients qui restaient non décanulables pouvaient être soit retraités dans le groupe électrostimulation soit traités dans le groupe SHAM dans le cadre d’une étude ouverte.

Résultats essentiels

35 patients ont été randomisés dans le groupe PES et 34 dans le groupe SHAM. 17 (49 %) patients étaient décanulables d’emblée dans le groupe PES et 4 après retraitement. Dans le groupe SHAM, 3 (9 %) patients ont été initialement décanulés et 16 dans la seconde phase avec PES. Au total 65 patients ont terminé l’étude dont 37 (57 %) décanulables. La tolérance était identique entre les groupes. Une analyse post hoc combinant les résultats de cette étude et d’une étude monocentrique qui utilisait le même critère de jugement a montré que les patients traités par PES avaient 10 fois plus de chance d’être décanulés.

Commentaires

Les troubles de déglutition persistant après AVC représentent un problème majeur grevé d’une lourde morbidité et mortalité notamment liée aux inhalations. Malgré un effet sur la qualité de déglutition, la durée d’hospitalisation, le nombre d’infection pulmonaire, les nombreuses techniques disponibles (pharmacologique, comportementale, rééducation électrostimulations neuromusculaire ou pharyngée, stimulation transcrânienne), il n’y a pas d’effet sur la mortalité, la récupération neurologique ou le score d’aspiration (1).

Parmi les techniques disponibles les techniques de stimulation transcrâniennes et de stimulations neuromusculaires de surface semble donner de meilleurs résultats que la stimulation pharyngée (2).

Points forts

L’étude est de bonne qualité méthodologique avec un groupe SHAM, le critère d’évaluation fiable et validé, la technique facile à mettre en œuvre.

Points faibles

Les petits effectifs et la technique concerne peu de patients concernés 1 À 2 % des AVC totaux et 25 % des AVC ventilés. Pas de démonstration chez les non trachéotomisés. Simple aveugle.

Implications et conclusions

D’après les auteurs l’effet de la PES s’exerce soit sur la plasticité cérébrale soit sur une composante de neuromyopathie. Néanmoins il ne semble limité qu’à une petite fraction de la  population d’AVC, ventilés et trachéotomisés. Les résultats ne pouvant pas être extrapolés à l’heure actuelle dans d’autres catégories ou pathologies.

Texte

CONFLIT D'INTÉRÊTS

Article commenté par le Dr. David Orlikowski, Service de Réanimation, Hôpital Raymond Poincaré Garches, GHU PIFO, France.

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt.

Le contenu des fiches REACTU traduit la position de leurs auteurs, mais n’engage ni la CERC ni la SRLF.
Envoyez vos commentaires/réactions à l’auteure (david.orlikowski@aphp.fr) ou à la CERC.

Texte

LIENS UTILES

  1. Swallowing therapy for dysphagia in acute and subacute stroke.
    Bath PM, Lee HS, Everton LF.Cochrane
    Database Syst Rev. 2018 Oct 30;10:CD000323. doi: 10.1002/14651858.CD000323.pub3.
  2. Comparative Efficacy of Noninvasive Neurostimulation Therapies for Acute and Subacute Poststroke Dysphagia: A Systematic Review and Network Meta-analysis.
    hiang CF, Lin MT, Hsiao MY, Yeh YC, Liang YC, Wang TG.
    Arch Phys Med Rehabil. 2019 Apr;100(4):739-750.
Texte

CERC

JB. LASCARROU (Secrétaire)
SD. BARBAR
F. BOISSIER
G. DECORMEILLE
N. HEMING
B. HERMANN
S. HRAIECH
G. JACQ
JF. LLIJTOS
L. OUANES-BESBES
G. PITON
L. POIROUX