Séjourner en réanimation est un évènement traumatisant par :
- La maladie qui vous y a conduit
- Les soins prodigués (sédation, intubation, traitements, contentions…)
- L’environnement dans lequel vous avez vécu durant cette période (les sons, les écrans, les appareils, …)
- Les répercussions sur votre quotidien a posteriori et les bouleversements que cela peut induire.
➡️ C’est un évènement générateur de stress plus ou moins important
Ponctué d’angoisses et d’anxiété
Cela peut être la peur de mourir, la peur d’avoir failli mourir, la peur de la maladie et/ou de son aggravation, l’angoisse de l’avenir… ou bien d’autres choses en lien avec votre histoire personnelle.
Cette anxiété peut se manifester sans raison apparente, par exemple lorsque vous devez retourner à l'hôpital pour des examens, des consultations, ou même simplement rendre visite à un proche, passer devant l’établissement…
Ces symptômes peuvent être déclenchés par un son. Un patient a ainsi longtemps ressenti une vive émotion lors du passage des hélicoptères : ce n’est que 2 ans après son séjour qu’il a compris, en parlant avec son conjoint, que ce son le renvoyait au bruit du respirateur artificiel auquel il était relié. Les symptômes d’anxiété peuvent également être déclenchés par une odeur ou un objet que vous voyez, un film ou une émission médicale (surtout s’il y a des images).
La date anniversaire de votre hospitalisation peut également faire partie des éléments émotionnellement déstabilisants.
Parmi les nombreuses émotions, certaines sont aussi marquées par des souvenirs positifs : votre 1ère douche, et pourquoi pas le 1er brushing, votre 1ère sortie à l’extérieur de votre chambre, le 1er moment conscient avec votre conjoint ou votre enfant… autant d’évènements qui ont une tout autre importance, une tout autre « saveur », et qui résonnent positivement dans votre quotidien.
Ponctué de changements d’humeur brusques, incontrôlés et incontrôlables parfois
Mais aussi des réactions vives, parfois incontrôlées (passant du rire aux larmes, de la colère à l’apaisement, à l’apathie, de l’envie au renoncement, de l’empathie au rejet…), de changement momentané ou plus définitif de traits de caractères voire de comportement.
Toutes ces émotions méritent autant que possible votre attention, mais il peut y avoir un décalage entre le moment où elles s’expriment, où vous les vivez et l’objet, le traumatisme, auxquels elles doivent être rattachées. En parler à un psychologue peut vous permettre de comprendre et avancer.
Activant un ascenseur émotionnel fluctuant (vous pouvez ainsi passer du bonheur d’être en vie à la peur de mourir, en passant par l’appréciation toute simple de l’instant présent…)
➡️ Le séjour en réanimation ne laisse donc pas que des cicatrices physiques mais également des « cicatrices psychologiques », et cicatrices qui peuvent se rouvrir dans les semaines, voire des mois après votre sortie… Il est important d’y porter attention et de les soigner elles aussi, une nécessité pour qu’elles s’estompent progressivement, et apprendre à vivre avec.
➡️ Certains patients souffrent de symptômes dépressifs se caractérisant notamment par une tendance à se laisser aller, à se replier sur eux-mêmes, à ne plus s’occuper d’eux et/ou de leur intérieur, à ne plus s’alimenter correctement …
💡 Vous pouvez en effet être déstabilisé, avoir perdu un certain nombre de repères qui ponctuaient votre vie avant votre séjour.
Reprendre le plus rapidement possible ses habitudes peut parfois aider à retrouver votre rythme de vie.
Même de retour à leur domicile, il n’est pas rare de ressentir un sentiment de culpabilité à l’égard des autres, principalement de leurs proches (culpabilité pour le traumatisme causé lors de l’hospitalisation, surtout si leur pronostic vital a été engagé, mais également au retour à cause des répercussions dans la vie quotidienne (évoqué ci-dessus).
💡 Il est important de pouvoir parler des sentiments ressentis, que ce soit à vos proches et/ou à des professionnels de santé
➡️ Certains peuvent également vivre cette expérience comme une injustice (pourquoi moi ?) et en vouloir à « tous » … et ce d’autant plus :
- Si les séquelles immédiates sont assez lourdes et bouleversent la vie quotidienne
- S’il y a un manque d’informations, d’explications sur la maladie et le séjour en réanimation
- Si leurs pathologies se caractérisent par des soins, des traitements, des symptômes réguliers.
➡️ C’est un évènement marquant aux contours parfois flous (avec des difficultés à se remémorer vraiment les évènements)
Ces contours flous sont renforcés par le fait que bien souvent, la réanimation signifie que vous avez vécu une période de coma. Qui dit coma, dit absence de souvenirs conscients, de ce qu’il s’est passé.
Vous pourrez néanmoins en garder des souvenirs, des traces sensorielles qui parfois reviennent plus tard, à distance de la réanimation. Le sommeil et les rêves associés sont parfois la trace de votre activité psychique durant votre coma.
➡️ Après votre séjour, votre sommeil peut être perturbé par des cauchemars, des réveils fréquents et des difficultés à vous endormir et / ou vous rendormir.
Ces réveils empreints de rêves, voire de cauchemars étranges, inexpliqués de prime abord, récurrents parfois.
Certains patients racontent des rêves de voyage en bateau, ou des cauchemars où ils étaient prisonniers, torturés. Ces rêves et ces cauchemars peuvent être en lien avec ce que vous avez vécu en réanimation. Par exemple, il arrive que durant leur coma et en étant sous respiration artificielle, certains patients aient des contentions, c'est à dire avec les mains attachées au lit afin d'éviter un retrait des tuyaux (sonde d'intubation, cathéters veineux...) en cas d'agitation. Certains patients racontent aussi se souvenir de l'inconfort de la table de scanner. Ces sensations peuvent se traduire par des cauchemars où on ne peut plus bouger, où on est attachés et prisonniers
Vous pouvez avoir des flash-backs, des souvenirs soudains qui apparaissent sans contrôle et avec détails d'une expérience passée à l'hôpital ou en réanimation. Ces flashbacks peuvent être très brefs et vous pouvez même vous demander s'ils sont bien réels.
En parler avec vos proches, mais aussi avec l'équipe de réanimation (même après votre hospitalisation) et le psychologue de la réanimation (ou autre) et/ou visiter le service permet de mettre des mots et des images sur ce par quoi vous êtes passés et les émotions ressenties. C’est le meilleur moyen de comprendre, de se libérer et ainsi de se reconstruire.
Votre maladie et votre séjour dans le service de réanimation (toutes les alarmes et les bruits de la chambre de réanimation, la perte des phases jours/nuits, une certaine appréhension à l’endormissement notamment si vous avez été dans le coma…) peuvent être la cause de ce sommeil troublé et vous pouvez mettre plusieurs semaines à récupérer un sommeil comme avant la réanimation.
💡 Privilégier les activités calmes avant de vous coucher (lecture, radio...), éviter les stimulants en fin de journée (café, thé...), pratiquer des activités relaxantes en cours de journée (yoga, méditation, activités sportives modérées…) peut aider face à un sommeil perturbé.
➡️ Nombreux patients témoignent de symptômes du syndrome de stress post-traumatique après leur hospitalisation en réanimation.
Ces symptômes s’estompent généralement durant le premier mois après la sortie et un retour à domicile. Cependant, s’ils devaient persister, il est important d'en parler avec vos proches et votre médecin traitant.
Votre médecin généraliste pourra vous orienter vers un psychologue/psychiatre spécialisé pour vous aider à traverser cette période difficile et peut-être vous proposer un traitement.
Vous pouvez également en parler avec le médecin réanimateur si vous êtes conviés à une consultation post-réanimation.
💡 Ce n’est pas toujours facile pour les proches de comprendre ce qui vous traverse. Peut-être que leur en parler pourrait les aider à mieux comprendre et ainsi à mieux vous accompagner face à vos difficultés.
En parallèle, il est peut-être intéressant de mettre en place des stratégies que anti-stress telles que des activités artistiques, l’écriture, des activités corporelles douces, au sein de la nature… à vous de choisir en vous laissant guider par vos possibilités, vos envies. Choisissez des activités permettant de vous apaiser, des activités qui vous plaisent (que vous rêvez peut-être de faire depuis longtemps, sans jamais en prendre le temps)
L’après réanimation peut parfois être un ascenseur émotionnel. L’accompagnement par vos proches et des professionnels de santé est important sur ce chemin de la reconstruction.